À la suite de la démission de l’ancienne maire, Patricia Tordjman, le conseil municipal avait été réuni au gymnase Maurice Baquet le 2 mars 2024 pour élire le nouveau maire de Gentilly puis neuf adjoints.
Immédiatement après l’élection de Fatah Aggoune comme nouveau maire, le chef de l’opposition municipale, Benoît Crespin, l’avait interrogé sur la validité de la désignation des adjoints à intervenir. Le maire avait écarté l’objection, renvoyant le règlement du « problème » à d’autres lieux, d’autres « institutions », vraisemblablement les juridictions administratives.
Un recours
Effectivement, saisi par le chef de l’opposition municipale d’un recours contre l’élection du maire et des neuf adjoints, le Tribunal administratif de Melun a jugé, vendredi 3 mai 2024, que l’élection des adjoints était irrégulière tout en validant celle du maire. Pour quelles raisons ?
Parce que l’article L. 2122-8 du code général des collectivités territoriales dispose qu’avant toute convocation du conseil municipal pour élire le maire ou les adjoints, « il est procédé aux élections qui peuvent être nécessaires lorsque le conseil municipal est incomplet ».
Or, le conseil municipal de Gentilly était incomplet en raison de la démission de la quasi-totalité des membres de la liste menée par Farid El Arche, déposée en mairie peu avant l’envoi de la convocation du conseil municipal. Cette circonstance aurait pu justifier une nouvelle élection de l’ensemble du conseil municipal.
Mais les textes prévoient une exception : « lorsqu’il y a lieu de procéder à l’élection d’un nouveau maire, le conseil municipal est réputé complet si les seules vacances qui existent en son sein sont la conséquence de démissions données lorsque le maire a cessé ses fonctions et avant l’élection de son successeur » (article L. 2122-9 du même code). Si Farid El Arche avait annoncé ces démissions dès le 22 novembre 2023, il ne les a déposées que le 12 février 2024, postérieurement à la démission de la maire. Cette tardiveté explique que ces démissions sont sans effet sur l’élection du maire.
En revanche, les textes ne prévoient pas d’exception semblable pour l’élection d’adjoints : le conseil municipal doit préalablement être complété.
Cela ressort d’une décision du Conseil d’Etat qui, semblant considérer que la différence entre maire et adjoints est un choix du législateur, a annulé pour ce motif l’élection des adjoints au maire de Maurepas, commune des Yvelines (CE 19 janvier 2007, n°289431). Le maire de Maurepas avait ensuite essayé de se fonder sur l’article L. 2122-8 du code précité pour faire élire un 1er adjoint, mais cette élection a été également annulée par le Tribunal administratif de Versailles (TA Versailles 14 mai 2007, n°0702879).
Quelles suites probables ?
Les parties ont annoncé leur intention de faire appel. L’annulation de l’élection des adjoints ne prendra pas effet tant que l’appel n’est pas jugé par le Conseil d’Etat, ce qui devrait intervenir au plus tard en janvier 2025.
Si le Conseil d’Etat confirme le jugement du Tribunal administratif de Melun, la majorité municipale pourrait provoquer une nouvelle élection du conseil municipal, ce qui ne semble toutefois pas le plus probable.
Pour autant, renoncer à désigner des adjoints ou tenter de n’en désigner qu’un seul pourrait avoir une incidence sur les équilibres politiques internes à la majorité, car la désignation d’adjoints a notamment des aspects honorifiques et des effets protocolaires. Le fonctionnement de la municipalité ne devrait toutefois pas en être bouleversé. En effet, le maire peut déléguer la plupart de ses fonctions à des conseillers municipaux même sans le titre d’adjoint.